Le Nom au-dessus de tous les noms

Église Unie St-Pierre et Pinguet https://www.stpierrepinguet.org/wp

Cette semaine : un fait quelque peu déroutant… et peut-être significatif de l’Esprit de ce monde. Un évènement historique important est, hélas, quasiment passé sous le radar de nos journaux électroniques. À peine une mention à Radio-Canada, quasiment silence radio chez les autres. C’est pour dire qu’il m’a fallut tomber au hasard sur le site web d’Amnistie international pour me rappeler que, dès dimanche passé, débutait la 30e commémoration du génocide Rwandais. Autant le peu d’intérêt généré par cette nouvelle que l’évènement en lui-même ont peut-être de quoi nous faire frisonner.

Je vous épargne les scènes épouvantables qui eut lieu dans ce triste évènement qui coûta la vie à plus de 800 000 personnes, toutes victimes de meurtres systémiques sur fonds d’idéologie raciste. Gardons seulement à l’esprit les monuments où furent gravé nombre de noms ainsi que l’exposition des restes des dépouilles à Kigali. Tous ces marqueurs soulignent un devoir de mémoire.

Un devoir de mémoire… Nommer des personnes, nommer des blessures, des expérience traumatiques est un geste nécessaire pour prendre contact avec la réalité et ensuite l’intégrer dans notre compréhension de notre propre histoire. C’est une nécessité pour nombre de tragédies. Vous savez… Pâques commémore aussi – à la base – une tragédie.  Un moment traumatique où, effrayés, les disciples peinent encore à reconnaître la résurrection de Jésus qui leur apparaît. Celui-ci, devant leur regard incrédule, leur dit tout simplement :

« Regardez mes mains et mes pieds : c’est bien moi, Jésus… »

Cette manière qu’à Jésus de se présenter peut nous intriguer et nous questionner sur l’acte même de nommer quelqu’un. Nommer a – au niveau du langage et de l’intelligence – un pouvoir évocateur, mais aussi invocateur au niveau de notre foi. C’est en nommant la personne que l’on se souvient d’elle et que nous la portons dans notre cœur.

Le nom de tous et chacun, lorsque évoqué, nous révèle une histoire et une identité. D’ailleurs, il faut dire que les Écritures nous rapportent nombre d’exemples de cette importance de nommer pour comprendre qui nous sommes. Nombreux sont les personnages bibliques qui portent des prénoms significatifs ou changent de prénom en faisant alliance avec le Seigneur. Même ce dernier possède un nom, quoique imprononçable par raison d’humilité. Nous, les êtres humains, ne pouvons nommer Dieu, car ce serait prétendre à le saisir pleinement. On ne peut que le saisir qu’à partir de notre histoire sainte.

Surprise alors que ce fameux « nom de Jésus ­» pour désigner l’action de Dieu, la Parole faite chair qui sauve et guérit. Mais, quand on y pense bien, ce n’est pas si surprenant que ça à la lumière des Évangiles qui nous racontent toutes sortes de moments où l’identité de Jésus consiste en un véritable enjeu narratif. Souvenons-nous de comment les apôtres sont souvent embêté par rapport à qui il est. Bien que les disciples pressentent parfois l’identité de Jésus comme ce fut le cas de Pierre qui l’identifia comme Christ, ils le reconnaissent ici par ses blessures, les traces d’une mort atroce laissé sur son corps.

« Regardez mes mains et mes pieds : c’est bien moi, Jésus. »

Celui-ci porte la marque de celui qui a traversé la mort et qui est resté intègre dans la vie éternelle. En le nom de Jésus qui a vécu, est mort et est ressuscité, nous sommes liés au Dieu de la vie au-delà même de la mort. Pierre et Jean nous rappellent respectivement dans le Nouveau Testament que, bien que Dieu nous transcende, il s’incarna néanmoins parmi-nous. « Jésus » est le nom au-dessus de tout nom puisque c’est par lui que Dieu s’est fait connaître. En partageant notre vie et notre condition, il a reçu un nom et – par conséquent – s’inscrivit dans l’histoire du peuple des saints avec toutes ses joies et toutes ses douleurs.

C’est dans ses joies et ses douleurs, oui, qu’on on parle d’un Dieu qui, incarné, est mort crucifié. Compte-tenu de la croix qui le définit dans son identité, j’estime que le nom de Jésus est aussi le nom de tous ceux qui sont morts sous le fer de l’injustice. Jésus est ce nom qui porte la marque des tragédies dans ses mains et son côté. Il a été pénétré de nos propres douleurs, avec les clous du génocide Rwandais, de Auschwitz et de bien d’autres qui se déroulent même en ce moment même.

Frères et sœurs, nous faisons partie du peuple de Dieu. Nous sommes ses enfants bien-aimés qui vivent parmi-lui et en lui. Tout comme les disciples dans les Actes des Apôtres, nous ne pouvons rien par nous-même,  car nous dépendons de cette relation à un être qu’il faut nommer et ensuite incarner.

Je termine ma réflexion en vous partageant un concept extraordinaire qui nous provient de la culture africaine et qui exprime bien cette réalité de notre dépendance : Ubuntu. Sans les autres, sans l’altérité nous ramenant à celle de Dieu et du corps auquel j’appartiens, je ne suis rien. Une partie sans tout ne peut exister. Un membre sans corps non plus. Nous sommes liés aux uns et aux autres comme humains. Comme chrétiens, nous sommes liés à Jésus par son Nom portant nos souffrance et notre résurrection. En celui-ci, nous sommes tous unis.

Confiant en ce Nom qui est le fondement de notre foi et de notre fraternité avec tous les crucifiés que nous sommes, engageons-nous humblement. Vivons notre mission, les uns et les autres, avec des yeux grands ouverts, les yeux du cœur de Jésus qui aime sans frontières. Un cœur qui, même traversé par le fer d’une lance, pardonne sans mesure.

Mes amis, que soit avec vous la paix du Seigneur Jésus, celui à qui a été donné le Nom au-dessus de tous les noms.

Amen

LECTURES BIBLIQUES

Actes 3, 11-19

Psaume 4

1 Jean 3, 1-7

Luc 24, 36-48

 

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