Il était pour lui comme un père

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Gérald DoréPeut-être avez-vous déjà entendu dire, à propos du rapport d’un homme à une autre personne : « Il était pour lui ou pour elle comme un père ». C’est une façon de parler que Jésus a adoptée, non pas à propos d’un homme de son entourage, mais à propos de Dieu lui-même. Dieu était pour Jésus comme un père.

Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Vous pouvez cliquer sur les liens pour lire les extraits.


Le Dieu de la Bible, celui qui se révèle à Moïse, n’est pourtant pas, à première vue, un être proche et familier. À Moïse qui lui demande son nom, il répond par un mot hébreu dont il nous est resté quatre consonnes : « yod, hé, waw, hé » correspondant dans notre alphabet à « y, h, w, h ». À cause de l’absence de voyelles, on ne sait pas trop comment le prononcer.  Les biblistes protestants ont longtemps réglé la question en introduisant dans le mot les voyelles « é, o, a », ce qui donnait Jéhovah, un nom qui n’est plus utilisé aujourd’hui que par les « Témoins … de Jéhovah ». La Bible de Jérusalem, la plus répandue chez les catholiques, a opté pour la prononciation Yahvé ou Yahweh. Le pasteur Jean-Louis Segond, traducteur de la Bible qui a longtemps été la référence classique du protestantisme, a renoncé, en son temps, à choisir une prononciation. Il a plutôt remplacé le mot, chaque fois qu’il apparaît, par « L’Éternel »; ce qui était une manière de rendre compte du sens du mot.

En fait, à partir de la racine hébraïque, le mot voudrait dire, selon Second et la Bible de Jérusalem : « Je suis celui qui suis », et plus loin « Je suis », tout simplement. Dieu est, tout simplement. Dieu est; cela devrait suffire à Moïse, sans qu’il  cherche à percer le mystère de Dieu.  La Traduction œcuménique de la Bible, la TOB, celle que nous utilisons ici le plus souvent, traduit le mot par « Je suis qui je serai », et plus loin par « Je serai ». En d’autres mots, « je serai », parce que je reste à découvrir par toi dans le cours de ta vie. Une troisième traduction possible est parfois proposée : « Je suis qui je suis ». Autrement dit, je ne veux pas ou je ne peux pas te dire qui je suis, parce que cela dépasserait ta capacité de comprendre.

Le remplacement du mot imprononçable par « L’Éternel », dans la bible Segond, marque bien la distance qui sépare Moïse du mystère de Dieu; à plus forte raison, qui nous sépare, nous, du mystère de Dieu. Pourtant…, pourtant…, dans la réponse de Dieu à Moïse, la distance et le rapprochement vont ensemble, main dans la main. Dieu est un Dieu personnel. Il est Dieu d’Abraham, Dieu d’Isaac, Dieu de Jacob; et plus loin dans la Bible, Dieu de Sarah, de Rébecca, de Ruth, d’Esther, de Judith, de Marie, de Jésus et, en dehors du texte biblique, de chacun et chacune d’entre nous par son prénom.

Dieu est à la fois loin de nous et près de nous. Il est qui il est, mais en même temps, au psaume 23, il est pour nous comme un berger qui nous guide par le juste chemin. Ni homme ni femme, bien sûr, il est, chez Ésaïe, comme une mère qui nous prend sur ses genoux. Au psaume 103, il est comme un père : « Comme un père a compassion de ses fils, l’Éternel a compassion de ceux et celles qui le craignent »; non pas au sens de ceux et celles qui ont peur de lui, mais qui sont sidérés, saisis de stupeur devant son mystère.

Parmi les images bibliques qui expriment que Dieu-loin est proche, c’est cette image du père qui est la préférée de Jésus. C’est l’image qui exprime le mieux pour lui sa relation intime à Dieu. Un auteur chrétien américain a, dans un de ses livres, partagé à ses lecteurs et lectrices son idée que Jésus devait avoir grandi avec un père exceptionnel, pour qu’il imagine ainsi Dieu comme un père parfait. Dans la société de Jésus, le père est un patriarche, une figure d’autorité qui peut être distante, dont l’autorité peut éventuellement être crainte par les enfants. En même temps, s’il est un bon père, son autorité en est une d’affection et de compassion. Chez Jésus, cette dernière qualité est poussée à son comble dans l’image de Dieu-Père. La figure d’autorité du père se dissout chez lui dans l’amour inconditionnel qu’on reconnaît habituellement à la mère. C’est ce qui ressort nettement de la parabole bien connue et dite du « fils prodigue », mais qui est, en réalité, une parabole de l’accueil sans réserve par Dieu de celui ou celle qui se tourne vers lui. Au Jardin des oliviers, au pire de la détresse et de l’angoisse, Jésus s’adressera à Dieu en employant le mot araméen « abba » qui correspond à notre mot « papa ».

Dans le passage de l’épître aux Romains que nous avons lu, l’apôtre Paul nous invite à faire de même, en mettant de côté une représentation oppressive de Dieu : « vous n’avez pas reçu un esprit qui vous rende esclaves et vous ramène à la peur, mais un Esprit qui fait de vous (des filles) et des fils adoptifs et par lequel nous crions : Abba, Père. Cet Esprit lui-même atteste à notre esprit que nous sommes enfants de Dieu. » (Rm 8, 15-16). Dans son être éternel, Dieu n’est ni un homme, ni une femme, ni une mère, ni un père. Ce qu’on peut dire, cependant, c’est que son amour pour nous est comme ce qu’il y a de meilleur dans l’affection qu’une mère ou un père porte à ses enfants.

Dieu est pour Jésus comme un père. Si on veut être avec Jésus dans son union spirituelle à Dieu, il ne suffit pas de dire machinalement le « Notre Père ». Il faut garder présent à l’esprit le sens de la comparaison par Jésus de Dieu à un père aimant. Dieu qui est loin par son mystère est proche par l’amour inconditionnel qu’il nous porte; l’amour d’un père-mère, d’une mère-père porté à sa perfection. C’est ce qui fait que nous pouvons nous adresser à lui dans la prière à la manière de Jésus. Il est « notre père », le très bas, le très proche de nous, tout en étant « aux cieux », c’est-à-dire dans un mystère qui nous échappe, mais d’où il vient vers nous avec une infinie sollicitude. C’est ce que nous croyons. C’est ce que nous osons croire, à la suite de Jésus.

Amen.

Par Gérald Doré, pasteur bénévole associé

Église Unie Saint-Pierre et Pinguet

Culte du dimanche 13 novembre 2016

 

LECTURES BIBLIQUES

Exode 3, 13-15

Romains 8, 15-16

Matthieu 6, 9-10

 

 

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