Pour qui voter

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Gérald - plus petitSupposons qu’à l’instant même, je vous dise que ma prédication d’aujourd’hui va servir à vous dire pour qui voter. Supposons, j’ai dit! Supposons que pour ceux et celles qui habitent dans le comté d’ici, un des comtés qui a le nom le plus long au Canada, Montmagny-L’Islet-Kamouraska-Rivière-du-Loup, je vous dise que ma prédication va vous aider à choisir entre François Lapointe, député sortant du Nouveau Parti Démocratique; Bernard Généreux, ancien député conservateur et de nouveau candidat du Parti Conservateur; Marie-Josée Normand, candidate du Parti Libéral, dont le père a autrefois représenté à Ottawa la partie Montmagny-L’Islet du comté; et Louis Gagnon, un nouveau en politique qui se présente pour le Bloc Québécois, le parti auquel la partie Kamouraska-Rivière-du-Loup du comté actuel a donné son vote majoritaire pendant seize ans.

Les extraits de la Bible inspirant cette réflexion sont donnés à la toute fin de la prédication. Afin de l’apprécier pleinement, il est préférable de lire, au préalable, les textes bibliques dans la version TOB, accessibles via le site http://lire.la-bible.net/.

 

Supposons que je ferais ce que je viens de dire! Il s’en trouverait sûrement parmi vous pour se dire : « Hum! Hum! J’aime pas ça! Le pasteur mêle religion et politique! » D’autres penseraient pouvoir tirer leur épingle du jeu en se disant : « Il peut bien dire ce qu’il veut. Ça n’influencera pas mon vote. J’ai déjà voté par anticipation. »

J’ai des petites nouvelles pour tout le monde. Ce dont je veux vous parler aujourd’hui, en vous donnant à penser que je vais vous dire pour qui voter, s’applique, en réalité, à n’importe quelle élection, peu importent les candidats ou candidates qui se présentent. Ce n’est pas tout à fait vrai que la religion ne se mêle pas de politique. Bien sûr, même si elle en avait encore les moyens, comme ce fut le cas autrefois, la religion ne devrait pas avoir la prétention d’imposer à qui que ce soit pour qui voter. Par ailleurs, il lui revient de suggérer dans son enseignement à ses fidèles des critères de discernement qui peuvent guider leur choix, au plus près possible des exigences de leur foi. Dans ce sens-là, la Bible se mêle de politique et nous donne des indications qui devraient pouvoir nous inspirer à la veille d’un vote, même si aux temps bibliques et à l’époque de Jésus, le vote n’existait pas.

D’abord, apprécions le fait que nous ayons un mot à dire par le moyen du bulletin de vote. Aux temps bibliques, les gens ordinaires comme nous n’avaient aucun moyen de sanctionner et de renvoyer à leurs affaires privées les politiciens qui exerçaient le pouvoir dans leur intérêt personnel, au détriment du bien-être de l’ensemble du peuple. Ceux et celles qui voyaient ce qui se passait pouvaient toujours parler et, s’ils étaient instruits et dans une position d’influence comme l’était Jérémie, ils pouvaient le faire sur la place publique, mais c’était à leurs risques et périls. Jérémie l’a fait à l’égard du roi Yoaquim et il n’a été sauvé de la peine capitale que grâce à un nommé Ahiqam, fils de Shâfan qui avait été secrétaire du bon roi Josias, père de Yoaquim (Jr 26, 24). Or, que dit Jérémie à Yoaquim qui nous indique ce qui, d’un point de vue biblique, est carrément inacceptable de la part d’un politicien? Il lui dit ce que nous venons de lire : « Malheureux celui qui construit son palais au mépris de la justice, et ses étages au mépris du droit; fait travailler les autres pour rien, sans leur donner de salaire; qui dit « Je me construis une vaste maison, de spacieux étages »…Tu n’as de regards et de pensées que pour le profit, pour répandre le sang de l’innocent et agir avec brutalité et sauvagerie. » (Jr 22, 13-14 et 17).

Évidemment, nous sommes entrés, nous, dans un héritage politique qui a coûté à d’autre beaucoup de peines et dont nous profitons. Les politiciens et les politiciennes d’aujourd’hui n’ont plus accès à un pouvoir absolu qui leur donnerait la marge de manœuvre pour se livrer à des excès aussi extrêmes que ceux de Yoaquim.

Il s’en trouve toujours malgré tout pour trouver le moyen de contourner la justice et le droit, tout en faisant semblant de les respecter. Dans notre genre de société, grâce à la liberté d’expression, tout ou presque finit par se savoir. Nous avons par le vote le moyen de nous débarrasser des politiciens et des partis politiques qui manquent au droit et à la justice.

Personne ne peut plus faire ouvertement travailler quelqu’un sans lui donner de salaire, mais on peut garder le salaire minimum tellement bas qu’on condamne une partie de la population à la pauvreté, même quand elle a un emploi. Par le vote, nous avons le moyen de nous débarrasser des politiciens et des partis politiques qui n’accordent pas assez d’importance à la justice sociale, qui laissent les riches devenir toujours plus riches et les pauvres toujours plus pauvres, en prétendant que les mécanismes du marché finiront bien par rééquilibrer les choses; ce qui n’arrive jamais tout seul!

En parlant de la « vaste maison » avec un revêtement « de cèdre » de Yoaquim, Jérémie parle de ce qui était le luxe suprême pour l’époque; un luxe de privilégiés au mépris des besoins essentiels du peuple. Par le vote, nous avons le moyen de nous débarrasser de ceux et celles qui nourrissent les préjugés à l’égard de la politique en s’affichant avec les symboles d’un luxe ostentatoire. La morale protestante a toujours recommandé la sobriété du train de vie à ceux et celles que favorise la richesse. Aujourd’hui, on appelle ça « simplicité volontaire ». Pas évident que ce soit très populaire et très volontaire dans le monde politique!

Au style politique exploiteur et dominateur de Yoaquim, Jérémie oppose celui de Josias, son père : « Ton père n’a-t-il pas mangé, bu, défendu le droit et la justice, et il a connu le bonheur! Il a pris en main la cause de l’humilié et du pauvre, et c’était le bonheur! Me connaître, n’est-ce pas cela? –oracle du SEIGNEUR. » (Jr 22, 15-16). Demandons-nous qui sont les « pauvres » et les « humiliés » dans notre société et comment les candidats, les candidates et les partis prétendent « prendre en main leur cause », comme dit Jérémie. La réponse que nous donnerons à cette question devrait être un critère pour orienter notre vote, si la morale prophétique de la Bible compte pour nous. Suivant cette morale, ce ne sont pas nécessairement ceux et celles qui disent « Seigneur! Seigneur! Jésus est mon sauveur personnel! » qui « connaissent le Seigneur » en politique, mais celui ou celle, personne ou parti qui, dans les mots de Jérémie, « a pris en main la cause de l’humilié et du pauvre ».

Du point de vue de la politique, Jésus est tout à fait dans la tradition prophétique de Jérémie. Il ne se fait pas d’illusion sur les politiciens de son temps. À ses disciples il dit, nous venons de le lire : « Vous le savez, ceux qu’on regarde comme les chefs des nations les tiennent sous leur pouvoir et les grands sous leur domination. » (Mc 10, 42). Dans le contexte politique où vivent Jésus et ses disciples, il n’existe aucun mécanisme qui puisse leur permettre d’infléchir la conduite oppressive des politiciens qui dominent leur société. Au moins, Jésus formule le souhait que ses disciples n’adoptent pas entre eux ce genre de comportement. « Il n’en est pas ainsi parmi vous. Au contraire, si quelqu’un veut être grand parmi vous, qu’il soit votre serviteur. » (Mc 10, 43). Dans notre cas, par le vote, nous pouvons choisir la personne et le parti dont nous pensons qu’ils sont le plus orientés vers le service du bien commun. Ce n’est ni chrétien, ni sérieux et trop facile de se dire : « La politique, c’est tout du pareil au même! » Faire son devoir de chrétien, c’est discerner, choisir et voter à la lumière des enseignements de l’Évangile.

Maintenant que je vous ai dit pour qui voter, je vous rappelle la recommandation que l’apôtre Paul adresse à Timothée. Remplaçons le mot « rois » par celui de « députés et ministres » et prions pour tous ceux et celles que favorisera le scrutin de demain. « Je recommande donc, avant tout, écrit Paul, que l’on fasse des demandes, des prières, des supplications, des actions de grâce, pour tous les hommes, pour les rois et tous ceux qui détiennent l’autorité, afin que nous menions une vie calme et paisible en toute piété et dignité. » (1 Tm 2, 1-2).

Amen.

Par Gérald Doré, pasteur desservant
Église Unie Pinguet
Culte du dimanche 18 octobre 2015

LECTURES BIBLIQUES (TOB)
Jérémie 22, 13-18
1 Timothée 2, 1-2
Marc 10, 42-45

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