LE PAIN DE VIE : Grignotine ou étouffe-chrétien ? (Jean 6)

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Il faut quand même reconnaître que les personnes auxquelles Jésus s’adressait (Jean précise, et ce n’est pas fortuit, que c’était des Juifs) avaient toutes les raisons d’être estomaquées! Ne croyez-vous pas?

Jésus avait-il besoin d’être aussi graphique? A l’écouter nous pourrions presque entendre des bruits de mâchoires manduquant sa chair (le terme utilisé dans l’évangile se traduit par croquer, mâchouiller). En fermant les yeux, nous pourrions presque voir des traces rougeâtres dégouliner à la commissure des lèvres. Brr!

Jésus était un maitre dans l’art de choquer les gens bien pensants, vous savez, le genre d’individus imbus d’eux-mêmes, ou qui pratiquent leur religion un peu par tradition, sans trop se poser de questions.

Eh bien, par son sens de la formule et le génie qui était le sien de parler à plusieurs niveaux, Jésus jouait de la provocation et obligeait les gens à sortir de leur torpeur et à prendre position par rapport à lui et à l’irruption du Royaume de Dieu en leur sein. C’est qu’un drame était en train de prendre corps : le risque de périr de soif et de faim alors que la source est en face de soi et que le garde-manger est à portée de main.

Pour mieux comprendre la portée des paroles de Jésus et le pourquoi de la controverse, il nous faut, une fois de plus, mettre le passage en contexte. Cette histoire de pain de vie commence par une simple question de pain, au sens propre du terme. Le début de notre chapitre 6 en parle.

Les gens avaient eu faim et Jésus, après avoir rendu grâces, venait de nourrir une grande foule à partir des cinq pains d’orge et des deux poissons qu’un gamin avait avec lui. Depuis, Jésus n’avait plus la paix : les foules le suivaient comme son ombre. Mais pourquoi le poursuivaient-elles, vraiment? Voici la véritable question!

Les gens avaient des infirmités, et il les guérissait; ils avaient faim et pensaient avoir trouvé en lui leur source de sécurité alimentaire. Mais Jésus avait infiniment mieux à leur offrir.

C’est là qu’il y avait maldonne : obnubilés par la quête du nécessaire, ils couraient le risque de passer à côté de l’essentiel. Quel tragique malentendu … auquel nous nous exposons, nous aussi!

Pourquoi se contenter d’une grignotine, donc d’un simple coupe-faim, lorsque nous avons
accès à quelque chose qui peut satisfaire POUR TOUJOURS la faim sans pour cela devenir
un étouffe-chrétien? Au pays de la poutine, je ne pense pas qu’il soit très difficile de
comprendre ce qu’un « étouffe-chrétien » peut être. Il est seulement à espérer que la Parole
d’aujourd’hui ne nous pèse pas trop sur le ventre au point d’en faire une indigestion!

La foule perçoit en Jésus qu’un thaumaturge, un faiseur de miracles, mais elle ne « voit » pas,
dans le sens où Jean utilise le terme; elle ne discerne pas le signe véritable qu’il représente.
Son pouvoir de procurer du pain matériel n’est qu’une indication de qui il est. Comment pouvaient-ils manger ce pain-là qui ne satisfait qu’un besoin momentané et refuser le véritable pain qui leur est proposé et qui pour toujours les sustentera?

Parce que les gens connaissent Jésus en tant que fils de Marie et qu’ils se bornent à cette
dimension, ils risquent de passer à côté de la plaque! Ce pain descendu du ciel, pour lequel
eux-mêmes disaient Seigneur donne-nous toujours de ce pain-là (Jean 6 verset 34), est justement ici, à portée de main!

C’est toute l’incarnation qui est en jeu ici.

Dieu a pris corps dans notre réalité humaine. Dieu a fait irruption dans notre histoire et dans
notre vie. Jésus, le fils de Marie est AUSSI le Messie tant attendu, le pain de vie véritable.
C’est celui qui nous offre la vie éternelle ici et maintenant! Dieu est si proche que nous
pouvons le voir et le toucher. Il est même encore plus proche car il demeure en nous,
comme une nourriture que nous consommons, si nous voulons du moins le faire nôtre en
l’ingurgitant consciemment et librement.

Ce passage de Jean 6 rappelle certaines parties de la liturgie de Sainte-Cène. Comment le
comprendre dans ce cas de ce sacrement a donné lieu à maintes querelles; nos interprétations théologiques ont fait de la Parole, une source de divisions dans le Corps du Christ, une sorte « d’étouffe-chrétien ». La parole du Pain de Vie nous interpelle autrement, toutefois. Dans son recueil 100 prières possibles, le pasteur André Dumas (1918-1985) a bien raison d’écrire :
Ta Parole est aussi ordinaire et aussi essentielle que le pain. Elle n’est pas une brioche, réservée aux estomacs délicats, et elle n’est pas non plus un étouffe-chrétien, imposé aux estomacs rebelles. Ta parole c’est le vrai pain, descendu du ciel, pour la nourriture des hommes.

Nous sommes ici, ce matin, parce que nous avons des besoins de base, tout comme la foule
avait des besoins de base. Nous avons découvert que Jésus pouvait les satisfaire, et c’est
peut-être ce qui avait poussé les foules auprès de Jésus. Ces nécessités quotidiennes de la vie,
nous borneront-elles (comme un animal borné, au sens premier du terme) et nous
empêcheront-elles de saisir l’essentiel?

Qu’en est-il de notre vie éternelle? En avons-nous l’assurance parce que nous avons goûté au
Pain de Vie? Parce que nous mangeons sa chair et buvons son sang pour être un avec lui et
donc « faire la vérité », c’est à dire présenter et représenter le Royaume de Dieu?

Nous ne sommes pas invités à un acte de cannibalisme ou d’anthropophagie, réel ou
symbolique. Contrairement à ce que l’on pourrait penser et dont certains des premiers
chrétiens se sont vu accusés. Non! C’est un appel à prendre au sérieux l’incarnation de Dieu,
en Jésus Christ. C’est à dire en chacun et en chacune de nous. C’est le défi choquant de voir
le visage du Christ dans le visage des humains. C’est également la responsabilisation et le
pouvoir de présenter et représenter le Royaume de Dieu, ici et maintenant, par delà les
interprétations différentes et quelques fois conflictuelles.

Notre engagement n’est pas simple humanisme. Certes nous luttons pour la justice, le droit,
l’amour et la réconciliation. Certes, nous dénonçons et nous combattons l’injustice, le
mensonge, l’oppression et la discrimination. Nous le faisons pour des raisons humanitaires et
surtout parce que nous sommes les témoins de celui qui, non seulement offre le pain de vie,
mais EST le pain de vie! En lui nous avons reçu la vie éternelle, une fois pour toutes. Cette
Parole de vie n’est ni une grignotine ni un étouffe-chrétien, mais une nourriture solide et
journalière qui nous renouvelle et nous fortifie pour le reste de notre vie, de ce côté de
l’éternité.

Que ceux et celles qui ont des oreilles pour entendre, écoutent! Amen.

Samuel V. Dansokho
Eglise Unie St Pierre et Pinguet
Québec le 22 juin 2014

Textes bibliques du 22 juin 2014

Deutéronome 8.1-18

1Tout le commandement que je te donne aujourd’hui, vous veillerez à le pratiquer afin que
vous viviez, que vous deveniez nombreux et que vous entriez en possession du pays que le
SEIGNEUR a promis par serment à vos ancêtres. 2Tu te souviendras de toute la route que
le SEIGNEUR ton Dieu t’a fait parcourir depuis quarante ans dans le désert, afin de te
mettre dans la pauvreté ; ainsi il t’éprouvait pour connaître ce qu’il y avait dans ton coeur et
savoir si tu allais, oui ou non, observer ses commandements. 3Il t’a mis dans la pauvreté, il
t’a fait avoir faim et il t’a donné à manger la manne que ni toi ni tes ancêtres ne connaissiez,
pour te faire reconnaître que l’on ne vit pas de pain seulement, mais de tout ce qui sort de la
bouche du SEIGNEUR. 4Ton manteau ne s’est pas usé sur toi, ton pied n’a pas enflé depuis
quarante ans, 5et tu reconnais, à la réflexion, que le SEIGNEUR ton Dieu faisait ton
éducation comme un parent fait celle de son enfant. 6Tu garderas les commandements du
SEIGNEUR ton Dieu en suivant ses chemins et en le craignant.
7Le SEIGNEUR ton Dieu te fait entrer dans un bon pays, un pays de torrents, de sources,
d’eaux souterraines jaillissant dans la plaine et la montagne, 8un pays de blé et d’orge, de
vignes, de figuiers et de grenadiers, un pays d’huile d’olive et de miel, 9un pays où tu
mangeras du pain sans être rationné, où rien ne te manquera, un pays dont les pierres
contiennent du fer et dont les montagnes sont des mines de cuivre. 10Tu mangeras à satiété
et tu béniras le SEIGNEUR ton Dieu pour le bon pays qu’il t’aura donné.
11Garde-toi bien d’oublier le SEIGNEUR ton Dieu en ne gardant pas ses commandements,
ses coutumes et ses lois que je te donne aujourd’hui. 12Si tu manges à satiété, si tu te
construis de belles maisons pour y habiter, 13si tu as beaucoup de gros et de petit bétail,
beaucoup d’argent et d’or, beaucoup de biens de toute sorte, 14ne verse pas dans l’orgueil
pour oublier le SEIGNEUR ton Dieu.
C’est lui qui t’a fait sortir du pays d’Egypte, de la maison de servitude ; 15c’est lui qui t’a fait
marcher dans ce désert grand et terrible peuplé de serpents brûlants et de scorpions, terre de
soif où l’on ne trouve pas d’eau ; c’est lui qui pour toi a fait jaillir l’eau du rocher de granit ;
16c’est lui qui, dans le désert, t’a donné à manger la manne que tes ancêtres ne connaissaient
pas, afin de te mettre dans la pauvreté et de t’éprouver pour rendre heureux ton avenir. 17Ne
va pas te dire : « C’est à la force du poignet que je suis arrivé à cette prospérité », 18mais
souviens-toi que c’est le SEIGNEUR ton Dieu qui t’aura donné la force d’arriver à la
prospérité, pour confirmer son alliance jurée à tes ancêtres, comme il le fait aujourd’hui.

 

Jean 6.51-58
47En vérité, en vérité, je vous le dis, celui qui croit a la vie éternelle.
48Je suis le pain de vie.
49Au désert, vos pères ont mangé la manne, et ils sont morts. 50Tel est le pain qui descend du
ciel, que celui qui en mangera ne mourra pas.
51« Je suis le pain vivant qui descend du ciel. Celui qui mangera de ce pain vivra pour
l’éternité. Et le pain que je donnerai, c’est ma chair, donnée pour que le monde ait la vie. »
52Sur quoi, les Juifs se mirent à discuter violemment entre eux : « Comment celui-là peut-il
nous donner sa chair à manger ? »
53Jésus leur dit alors : « En vérité, en vérité, je vous le dis, si vous ne mangez pas la chair du
Fils de l’homme et si vous ne buvez pas son sang, vous n’aurez pas en vous la vie. 54Celui qui
mange ma chair et boit mon sang a la vie éternelle, et moi, je le ressusciterai au dernier jour.
55Car ma chair est vraie nourriture, et mon sang vraie boisson. 56Celui qui mange ma chair et
boit mon sang demeure en moi et moi en lui. 57Et comme le Père qui est vivant m’a envoyé
et que je vis par le Père, ainsi celui qui me mangera vivra par moi. 58Tel est le pain qui est
descendu du ciel : il est bien différent de celui que vos pères ont mangé ; ils sont morts, eux,
mais celui qui mangera du pain que voici vivra pour l’éternité. »

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